Pourquoi Cifer est si important pour les électriciens de réseau? Nous avons posé la question à Jean-Christophe Hadorn, consultant en énergies et stratégies.
Nous lui avons aussi demandé ce qu’il pense du projet CIFER 2.0. Il nous semblait en effet essentiel d’avoir un regard externe sur les enjeux que représente notre future localisation.
Au plaisir d’en parler avec vous…
Pour l’équipe: Jean-Paul Venditti, directeur
LA FORMATION, AUJOURD'HUI ET DEMAIN
Pourquoi CIFER a un grand rôle à jouer dans la formation et en quoi une localisation à Y-Parc est-elle intéressante? Jean-Christophe Hadorn nous donne son point de vue.
Monsieur Hadorn, vous êtes un expert de l’énergie solaire photovoltaïque. Où en est-on aujourd’hui en Suisse avec cette source d’énergie?
Jean-Christophe Hadorn: Nous ne sommes pas très avancés. Selon les objectifs fixés par le Conseil fédéral, nous devrions réaliser 1500 mégawatts par an, et nous en installons actuellement entre 300 et 600. Nous prenons chaque année du retard. C’est très dommage. Il suffit de regarder autour de soi pour voir le potentiel, notamment sur les toits.
Quels sont les obstacles principaux à ce développement?
J.-C. H. Longtemps les aides ont été limitées. Les personnes qui n’ont pas pu en bénéficier ont parfois renoncé à leur projet. Par ailleurs, les lois ne sont pas encore adaptées à une production émanant de particuliers.
En outre, on manque dans notre pays d’entreprises qui inventent, développent et installent le solaire, faute de grand marché domestique.
Trouve-t-on des spécialistes?
J.-C. H. En recherche et développement, oui. Globalement, la R&D est un domaine d’excellence en Suisse. Pour ce qui est de l’installation, un organisme comme CIFER est à même de former des spécialistes. Par contre nous manquons de capacités de production, notamment dans le domaine du BiPV (Building integration photovoltaics).
Que peut faire CIFER dans ce domaine?
J.-C. H. Si l’on développe une production à large échelle en Suisse, CIFER aura un grand rôle à jouer dans la formation. Tant pour le stockage ou la transformation de l’électricité en hydrogène (par exemple) que pour l’assemblage et l’installation.
Globalement, en quoi CIFER est-il stratégique pour la formation?
J.-C. H. D’abord dans ses métiers de base: les réseaux, la mobilité et les télécommunications: Il est nécessaire d’avoir des infrastructures de démonstration lourdes (lignes aériennes, de contact ou souterraines) ou précises (fibres). Pourquoi chaque GRD devrait-il avoir les siennes?
Dans le futur, il faudra sans doute former des spécialistes en mobilité électrique et en nouvelles technologies liées à l’électricité de réseau, comme la gestion des réseaux intelligents. Je pense notamment au solaire en grand, avec des batteries décentralisées et une gestion par blockchain permettant le découplage, le délestage, la tarification dynamique, etc.
En outre, la formation continue est essentielle pour les collaboratrices et collaborateurs des entreprises d’électricité comme pour les bureaux d’études techniques. Une plateforme comme CIFER peut enseigner les nouvelles technologies, y compris dans ses aspects pratiques.
Est-il pertinent de s’installer à Y-Parc, à Yverdon?
J.-C. H. CIFER ne pouvant pas rester dans ses locaux actuels, elle a cherché un peu partout en Suisse romande un emplacement suffisamment grand pour offrir toutes les prestations nécessaires à une formation de qualité.
Y-Parc possède plusieurs avantages. Déjà la localisation géographique, au centre de la Suisse romande. Mais surtout, Y-Parc est une plateforme idéale pour un centre de formation technologique avancé. On peut construire un bâtiment adapté aux besoins de la formation pratique. Atout supplémentaire: la proximité d’un environnement R&D, très motivant pour toute personne qui vient se former ou se post-former sur ce campus innovant.
Y compris pour de nouvelles technologies?
J.-C. H. C’est justement là que l’on trouve des start-up et des sociétés actives dans les nouvelles technologies. Celles-ci arrivent dans le domaine électrique assez rapidement. Je pense par exemple au drone: il y a deux ans on n’en parlait presque pas et aujourd’hui l’on ne se rend pas encore compte de l’importance qu’il aura dans deux ans.
De la pose de base des installations jusqu’à la gestion des contrats de vente, de trading et d’échange il y a un monde qui va s’ouvrir. Un monde que CIFER et les gens qui fréquentent le Centre pourront bien mieux capter en étant implantés à Y-Parc.
Personnellement, au vu de ses avantages, j’espère fortement que cette solution sera retenue pour CIFER.
JEAN-CHRISTOPHE HADORN
est ingénieur civil EPFL-SIA, et diplômé MBA de l’Université de Lausanne.
Il a été ingénieur de projets énergétiques en bureau d’études et consultant pour de grandes entreprises romandes.
Jean-Christophe Hadorn est un spécialiste international en énergie solaire. Il a conduit de nombreux projets dans ce domaine; il est aussi auteur de plusieurs livres sur le solaire, le stockage et les pompes à chaleur et connaît bien les aspects légaux qui freinent l’implantation d’énergie solaire à l’heure actuelle.
Il a dirigé en outre la recherche suisse en stockage de chaleur puis en énergie solaire thermique pour le compte de l’OFEN entre 1986 et 2016.
Jean-Christophe Hadorn s’occupe plus particulièrement depuis 2018 de stratégie d’entreprises, de fusion & acquisition et de gestion de litiges dans la construction.
RÉVISION DE LA FORMATION INITIALE
La révision des cours de formation initiale devra également prendre la localisation de CIFER en compte. Les futurs professionnels suivront deux modules communs et auront des formations séparées le reste du temps, selon leur orientation.
Cette modification nécessitera des ressources en termes de logistique – possibilité ou non de tout regrouper sur un seul site – et de ressources humaines, notamment pour les formateurs issus d’entreprise. Affaire à suivre…
APPEL
59 apprentis-es ont commencé leur formation en 2021. Un chiffre exceptionnel. La promotion semble porter ses fruits.
Rejoignez notre Think tank!
Nous mettons sur pied une demi-journée de réflexion sur la mutualisation des idées, des moyens, des ressources et des attentes en termes de promotion de nos métiers. La date de cet atelier sera définie ultérieurement d’entente avec les personnes intéressées.